Les Kinois sont littéralement tétanisés par la nouvelle de la mort de Tshisekedi. De Masina jusqu’à l’UPN, passant par Limete, quartier général du sphinx, les visages expriment l’émotion, la consternation et la douleur. Personne ne s’attendait à ce que le vieux s’en aille « si tôt ».
Les blogueurs de Habari RDC qui ont effectué un tour de la ville mercredi rapportent ici les témoignages des jeunes et vieux de la capitale. Ils pleurent « Ya Tshitshi » à leur manière avec leurs propres mots.
Commune de Limite
Limete c’est le fief historique du sphinx disparu. La circulation est trop calme dans la matinée, même s’il y a déjà quelques embouteillages sur le boulevard Lumumba. Comme à leur habitude, avec leurs motos-taxis appelés « wewa », les combattants (autre nom des militants de l’UDPS) sont bien présents, formant des groupes devant la résidence de Tshisekedi sur la 10e rue. On peut entendre de loin les voix des femmes et des hommes en train de pleurer leur héro.
Stationnés juste en face d’eux, les véhicules des policiers patrouillent aux alentours de la résidence du regretté « sphinx ». « Soudain, quelques étincelles d’affrontements éclatent entre les policiers et les militants vers 11h30 », raconte le blogueur Dido Songole, coincé dans les embouteillages sur cette avenue. Plus les minutes s’égrainent, plus la peur s’empare de notre blogueur pris en sandwich entre les manifestants et les policiers. Des coups de balles retentissent, la police réalise également des arrestations sur place.
« Les militants de l’UDPS viennent de briser les pare-brises de deux véhicules
Transco soussous mes yeux », témoigne le blogueur. Il réussit à se sauver de ses affrontements.
Toute la ville en parle
Partout à Kin, la population ne cesse de s’exprimer sur ce décès inattendu de Tshisekedi. Malgré les avis partagés, tous s’accordent sur l’impact qu’a eu la vie de cet homme sur notre pays. « Il est mort si tôt. Il sera difficile de trouver un homme capable de faire face au gouvernement comme lui. Ses mots d’ordre et villes mortes faisaient peur au gouvernement. Qui d’autre aura ce pouvoir de mobiliser toute la ville ? », explique Sylvie Tshole, habitante du quartier Masina, interrogée par le blogueur Aimé Kazika.
Une autre femme qui s’est exprimée, c’est Bénédicte Kabongo
Rencontrée par le blogueur Trésor Kalonji. Elle est vigile dans une société du centre-ville de Kinshasa. Pour elle, Tshisekedi laisse derrière lui un goût d’inachevé. « Il n’aura pas vu l’État de droit qu’il souhaitait voir naître dans notre pays. En plus, je trouve qu’il n’a pas suffisamment cultivé la démocratie dans son propre parti. Sans lui aux commandes, je crains que l’UDPS finisse par éclater », affirme Bénédicte.
Cet avis n’est pas partagé par Albert, 39 ans, fervent partisan de l’UDPS. Il a passé la nuit à la belle étoile, pleurant son idole à larmes réelles. Au micro du blogueur Don Momat, Albert déclare : « Tshisekedi est un véritable patriote et nationaliste. Il privilégiait les compétences dans le choix de ses collaborateurs », faisant référence aux trois derniers secrétaires généraux du parti.
Tshisekedi n’était pas une source d’inspiration que pour les plus âgés. Les jeunes aussi s’inspiraient de lui. Dans leur salle de cours, Levi Boaz et Ben Kamanga, étudiants de l’Université Pédagogique Nationale, engagent une discussion sur la mort de « Ya Tshitshi ». Pour eux, « Tshisekedi a atteint la plupart de ses objectifs. Il a gagné le respect et la notoriété partout dans le monde, sans avoir fait usage des réseaux sociaux », racontent-ils à la blogueuse Raissa Tshikandama.
À chacun sa façon de pleurer !
S’agissant des différentes façons de pleurer Ya Tshitshi, le blogueur Saka Lemien constate que les chauffeurs de taxis-motos expriment leur consternation par des rameaux qu’ils accrochent à leurs motos en signe de deuil. Certains les accrochent même à leurs casques de protection.
Par des larmes, par des réflexions ou des gestes de recueillements, la mort de Ya Tshitshi est vécue par chacun d’une manière personnelle. Nous retiendrons que « le plus grand mérite de Tshisekedi est d’avoir osé défier la dictature féroce de Mobutu. Depuis lors, le Congolais s’est débarrassé de l’idée du chef inattaquable et intouchable. Il est à ce titre, le père de la démocratie », a déclaré le journaliste José Musangana.