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Lumumba était un courant, un système : affaire indépendance immédiate (3)

Cette dernière partie du blog sur Lumumba, que je présente comme un courant, part de la protestation de l’Abako. Après la seconde guerre mondiale, l’Association des Bakongo, en effet, rejette la proposition de prolonger la colonisation de 30 ans au Congo belge.

Cette révolte profite des critiques internationales, de l’ONU et des États-Unis notamment, alertés par les protestants entre autres sources, après la seconde guerre mondiale. Les retards dans l’autonomisation des noirs au Congo ou dans les colonies belges dérangent et le système belge doit agir vite.

Un système violent et ségrégationniste au Congo belge

La sortie des photos des « mains coupées » n’a fait qu’amplifier les pressions qui avaient déjà commencé plus tôt, avant la seconde guerre mondiale. Et la participation des soldats et auxiliaires de l’armée des colonisés du Congo (la Force publique) à la seconde guerre mondiale, a eu l’effet d’ouvrir les yeux aux colonisés qui y avaient participé.

Pour la première fois, ils ont été traités comme des êtres dignes, égaux des

blancs. Les colons belges déjà sous pression, pour la dureté de leur système, notamment sur la brutalité, devaient faire bonne figure.

Tout cela devait jouer en faveur des colonisés. Les yeux désormais ouverts, et de retour au Congo après leur succès notamment à Gambela, en Abyssinie, ils inquiétaient les colonisateurs.

C’est pourquoi, une fois revenus au Congo, ils ont été installés dans des quartiers à part, admis aussi dans la classe d’évolués : ces colonisés noirs qui avaient enfin le droit de fréquenter les milieux blancs parce qu’ils avaient appris le français et assimilé les règles de savoir-vivre. Ils savaient manger avec fourchettes et cuillères et avaient acquis certains biens comme le vélo, le poste radio, etc.

Qu’est-ce que tout ceci nous enseigne ?

On retiendra de cette histoire au moins deux leçons. D’abord que l’émancipation des colonisés, malgré une instruction trop rudimentaire et volontairement limitée, est tout un ensemble d’événements qui se sont tissés au fil des années. En passant, je le rappelle, il y avait ce principe des colons au Congo belge : « Pas d’élites, pas d’ennuis ! » (à propos, lire le livre de Jean-Marie Mutamba Makombo sur l’évolution des évolué au Congo).

Il y a eu ensuite des pressions internationales, l’action des protestants, la montée d’une élite congolaise, bien que tardivement, et sans être exhaustif, l’arrivée des indépendances. Lorsqu’un pays devenait indépendant, il était peu probable que ses voisins ne le soient pas plus longtemps.

Bref, dire que Lumumba a été pressé de réclamer l’indépendance, ce n’est pas très sérieux et historiquement soutenable. Lumumba n’était pas un simple Lumumba : c’était un courant, un vent. Un vent comme celui de la perestroika en 1990; comme celui des indépendances. Sa personnalité y a beaucoup joué, mais n’est-ce pas naturel ? N’importe qui y aurait mis du sien. Et c’est ça qui le rend particulier dans ce courant africain des indépendances.

Ne pas prendre toute déclaration pour historiquement démontrée

Avant Lumumba, l’indépendance immédiate avait été prononcée plus tôt par l’Abako alors que Lumumba n’était pas encore le leader qu’on a découvert en 1959-1960. Vous le savez désormais.

J’ai rédigé ce blog pour rappeler à plusieurs notre devoir de lire l’histoire avec plus de critiques, et aux étudiants, d’user de leur esprit critique pour comprendre ce qu’ils apprennent.

Parfois, les enseignants et les aînés reproduisent des clichés, des faussetés et des erreurs. C’est dommage de reproduire cela à travers des générations. Lumumba n’est pas un Dieu qu’on ne devrait critiquer. Mais mentir à son égard n’est pas juste. Si le Congo va mal, ce n’est pas sa faute. Regardons-nous sans complaisance, reconnaissons notre laideur. Puis, soignons-la.

 

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