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Petit dictionnaire de l’alternance à la congolaise

Le microcosme politique congolais n’a pas fini d’enrichir la langue française avec des expressions et tournures originales. A l’occasion de l’arrivée d’une nouvelle « tête couronnée » au sommet de l’Etat, je n’ai donc pas été surpris de voir surgir des mots jusque-là inconnus. De curieux sens ont été conférés à des mots qui pourtant faisaient partie du quotidien des citoyens lambda. Voyons ce qu’il en est.

Président nommé

Une chose est sûre : au Congo, le commun des mortels a toujours cru qu’un président est un être incréé. C’est un self-made man, pour ne pas dire un homme qui existe par lui-même. Un président a toujours fait en sorte d’en faire voir de toutes les couleurs à son prédécesseur en renversant la table de la salle de banquet (le palais présidentiel). Il doit emprisonner tous les ministres du gouvernement précédent, à défaut de mettre la main sur leur chef.

Mais quand un chef de l’Etat qui entre en fonction semble ne pas incarner tout ça, il y a de fortes chances qu’il soit un président nommé. Mais comme l’a dit un sage : « Entre un président élu mais jamais en fonction et un président nommé qui peut passer les troupes en revue, le choix est clair. »

Soldat du peuple

Il n’abdique jamais lui ! Le soldat du peuple jouit d’une telle légitimité qu’il va chercher la vérité des urnes par-delà des horizons. Mais comme par-delà les horizons c’est souvent le néant, le président nommé peut continuer à se la couler douce. Au soldat du peuple d’obéir au commandant suprême des Forces armées lorsque la récréation politique sera finie. « On va s’y habituer », dirait avec un large sourire l’un des habitués du siège national de l’Union pour la démocratie et le progrès social  (UDPS) dans la commune de Limete à Kinshasa.

Commission électorale

Perchée dans le firmament, lieu d’où proviennent tous « les hommes forts de Kinshasa », la commission électorale décide de qui doit prendre le pouvoir et qui va rejoindre la longue liste d’opposants qui ne verront jamais la couleur du trône. C’est à se demander qui donne à cette machine à fabriquer des présidents le mandat et le pouvoir de faire basculer le destin des hommes politiques, petits ou grands. Mais il faut reconnaitre que quand on jouit du faste et des avantages que confère la fonction d’élu, on ne se pose pas une telle question. Sinon mettons donc au défi quiconque a décroché « le jackpot » à l’issue des élections du 30 décembre de crier à la fraude.  

Observateur électoral

Quel est le rôle d’un observateur sur un théâtre des opérations que l’on appelle bureau de vote ? La réponse à cette question dépend d’une personne à l’autre. On imagine le chef de l’Etat sortant répondre de façon laconique : « Un observateur a pour mission d’observer les va-et-vient des électeurs et c’est tout. » Si le concerné ignore des fois pourquoi il est là, son seul témoignage peut être à l’origine d’un long feuilleton électoral dont on prévoit rarement à l’avance le dénouement. D’autant plus que les pasteurs de l’Eglise et leur armada d’observateurs ont été en mesure de mettre en doute tout le processus de compilation des votes.

Communauté internationale

Personnellement, je me suis lassé de ne pas pouvoir déterminer qui se cache derrière l’expression « communauté internationale ». J’ai alors arrêté de faire des recherches et je me suis mis à faire autre chose. Néanmoins j’entends certains parler, valider ou rejeter certaines assertions concernant le destin de mon pays. Ne serait-ce pas eux la communauté internationale ? Tiens ! J’ai l’impression qu’ils ont tous des intérêts divers dans mon pays, pour ne pas dire des agendas cachés. Autant dire que communauté internationale et main noire c’est blanc bonnet bonnet blanc.

 

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