Tout le monde s’en souvient encore : le président Félix Tshisekedi l’avait promis lors de sa campagne électorale de 2018. On sait également qu’au tout début de son mandat, les indications sur les droits de l’homme avaient connu une nette amélioration. Avant, et c’est ce qui inquiète, de voir les habitudes reprendre leur droit.
La question qui taraude mon esprit à ce niveau c’est celle de savoir si Félix Tshisekedi, dans son Etat de droit, s’habitue aux pratiques des partisans de l’Etat policier, voire totalitaire, avec qui il semble bien forcé de composer.
Il faut l’avouer ainsi, et ce n’est pas exagéré de le dire : le FCC de Kabila n’a pas complètement été démantelé. Puisque ses bases, ses membres parfois les plus redoutables, ont gardé leur capacité de nuisance et leur influence. Influence sur l’appareil sécuritaire et administratif.
Ce ne sont pas les tonitruants et belliqueux membres de l’ancien bureau politique du FCC. Il s’agit plutôt de ces gouverneurs présents, des Assemblées provinciales ou des ministres provinciaux, des bourgmestres et des administrateurs des territoires. Les gradés de l’armée ou de la police, ainsi que des services secrets qui inspirent la peur, forcent les civiles et les pauvres gens sans défense, à subir leurs volontés iniques.
Des chiffres-clés
Il suffit de lire les récents rapports des organisations des droits de l’homme ou des médias. Même des députés ont le pouvoir de faire arrêter ceux qui les « importunent ». Parfois, il suffit d’avoir critiqué un « honorable » député pour passer un sale quart d’heure, voire des semaines au cachot.
En avril 2021, le Bureau conjoint de l’ONU aux droits de l’homme en RDC, rapportait 655 violations des droits de l’homme dans ce pays. C’est soit une augmentation de 32% par rapport au mois de février (495 violations).
Le rapport explique que ces violations sont attribuables à des militaires des Forces armées de la RDC (+127%). Les régions les plus concernées sont sûrement celles qui sont les plus militarisées. Les deux Kivu et le Tanganyika, arrivent en tête. La police aussi est impliquée (+64%), notamment dans les deux Kivu.
Le rapport poursuit : « Le nombre d’atteintes attribuables à des groupes armés a augmenté mais dans une moindre mesure (+8%) ». C’est avec notamment une intensification des attaques perpétrées par des combattants des Allied Democratic Forces (ADF), des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) et des Nyatura dans le Nord-Kivu.
Notez aussi que les agents de l’Etat sont responsables de 47% des violations documentées. Ce sont les exécutions extrajudiciaires d’au moins 37 personnes, dont 3 femmes et 5 enfants.
Félix converti ou en rupture avec les droits humains ?
Aujourd’hui, le chef suprême des armées et de l’Etat (dont l’administration), s’appelle Félix Tshisekedi. Deux ans après, il ne peut plus se trouver des excuses. Surtout qu’il a réussi à « déboulonner » ceux qu’il présentait comme responsables du refus du changement. Même s’ils sont encore là, comme je le constate plus haut, ils contribuent dorénavant à son action finale, dès lors qu’il les a acceptés dans sa gouvernance.
Pourquoi ne les punit-il plus ? Pourquoi des actions comme celle ayant conduit à un procès public d’un policier qui avait tiré lors d’une manifestation d’étudiants à Lubumbashi (2019) ne se répètent plus ? Félix Tshisekedi aurait-il été converti par ceux qu’il était censé convertir ?
Si le respect des droits humains ne peut s’améliorer, le Congo ne saurait se dire véritablement une démocratie, un Etat de droit ou un pays qui change. Je pense au moins que le président peut aussi marquer son mandat par ce genre d’actions qui bénéficient aux citoyens.