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Forum pour la paix dans les Kasaï, une montagne qui accouche d’une souris

Après le forum pour la paix dans les Kasaï organisé par le gouvernement à Kananga, peut-on désormais espérer la fin des conflits armés qui ont endeuillé cette région ? Rien n’est moins sûr. Certes, la hache de guerre semble avoir été enterrée par les participants à ce forum, mais de nombreuses questions se posent.

Forum pour la paix dans l’espace grand Kasaï, d’accord. Mais pourquoi rien n’a été dit sur les coupables, c’est-à-dire les instigateurs du phénomène Kamwina Nsapu et leurs complices qui sont aussi bien dans la majorité présidentielle que dans cette milice ? Le gouvernement congolais a sa part de responsabilité. Une part bien plus grande qu’on ne le pense. Dans cette affaire, il y a des gens dont la place devrait être en prison, mais ils ne sont jamais inquiétés et se la coulent douce à Kinshasa.  

Tout le monde sait que le phénomène Kamwina Nsapu est parti d’un conflit de pouvoir coutumier mal négocié par Kinshasa, le gouvernement ayant pris l’habitude de politiser le pouvoir coutumier en désignant unilatéralement des chefs traditionnels au mépris des us et coutumes des entités concernées.

Imaginez que les vrais chefs des milices, les victimes et les autorités impliquées, n’ont même pas pris part à ce fameux forum. Le gouverneur même de la province du Kasaï-Central, Alex Kande Mupompa et le député Clément Kanku étaient tous absents de ces assises, alors que de gros soupçons pèsent sur eux. Tant que l’État gérera les choses de cette manière-là, le pays n’en finira jamais avec ce type de conflits.

Les victimes oubliées

Par ailleurs, c’est quand même curieux que cette guerre des Kasaï considérée comme l’une des pires crises humanitaires au monde, avec 5000 morts et des crimes odieux, se termine sans que les auteurs moraux ne soient mis en prison !

Une autre question restée sans réponse, c’est celle des victimes de cette guerre dans les Kasaï. Tous ces déplacés internes et ces réfugiés éparpillés en Angola et ailleurs, quel sera leur sort ? Des civils sont morts, des policiers et militaires aussi. Des villages entiers ont été rasés, des familles brisées, des écoles et autres infrastructures détruites… Des annonces de prise en charge humanitaire ont été faites par le ministre de l’Intérieur Emmanuel Ramazani Shadary sans donner de mesures concrètes.

Au final, ce forum de Kananga n’aura servi qu’à donner du contenu au discours du président Kabila à la 72e Assemblée générale des Nations unies. Il devait l’avoir organisé pour se présenter à l’ONU dans une posture de garant de la paix au Congo. Bref, c’était un forum pour faire plaisir à son organisateur, le chef de l’État.

Le pacte des chefs coutumiers

Nous avons appris qu’au cours de ces assises, les chefs coutumiers venus de toutes les provinces du grand Kasaï ont signé un pacte de non agression. Ils se sont tous lavés les mains dans une même marmite comme le veut la coutume pour dire : « Plus jamais de violences dans leurs milieux, et qu’aucun chef traditionnel ne peut entretenir des milices dans les Kasaï. »

Seulement voilà, ce pacte est-il vraiment un acte réel et concret qui témoigne de la volonté et du profond engagement de ces chefs coutumiers à ne plus créer de conflits armés, ou alors est-ce juste un simple geste de leur hypocrisie ? Si l’État continue à remplacer les vrais chefs coutumiers par des acteurs politiques qu’il peut manipuler, n’y aura-t-il pas mécontentement ? Il faut trouver les vraies solutions pour ramener une paix durable dans l’espace Grand Kasaï.

Je pense pour ma part que la véritable paix et la réconciliation passent par une justice équitable rendue aux victimes et à leurs proches. Les auteurs et leurs complices doivent être identifiés, jugés et condamnés. C’est l’unique façon de faire cesser les violences et la folie meurtrière de ceux qui ont versé le sang dans le grand Kasaï.

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