Devrait-on s’étonner des nouvelles révélations de Human Rights Watch (HRW) sur le recrutement présumé de rebelles du M23 par le régime de la République démocratique du Congo ?
Dans l’environnement délétère de ces dernières décennies, dans l’hinterland aussi bien qu’aux frontières de la RDC, deux principes semblent dominer. Primo, « un rebelle s’improvise facilement mercenaire » et peut donc manger, sans scrupules, dans la main qui le gifla. Second principe : « les ennemis de mes ennemis sont mes amis ». Alors pourquoi ne pas embaucher, pour mâter le peuple, ceux qui furent tout à la fois nos adversaires et – déjà – les tortionnaires de ce même peuple ?
Le tout nouveau rapport de HRW revient sur la répression des manifestations qui eurent lieu entre le 19 et le 22 décembre 2016, après que le président Joseph Kabila ait refusé de quitter ses fonctions à la fin ses deux mandats permis par la Constitution. Ce serait avec la complicité d’ex-rebelles du mouvement du 23 Mars, recrutés pour l’occasion, que les forces de sécurité ont tué au moins 62 personnes et arrêté des centaines d’activistes et de leaders de l’opposition. Certains témoins affirment avoir entendu des soldats leur crier : « Nous sommes là pour vous exterminer tous ! ». Au lendemain des manifestations, les autorités ont refusé aux proches de victimes l’accès aux hôpitaux et aux morgues…
Mobilisés dans ce capharnaüm, ce sont au moins 200 anciens combattants rebelles du M23 qui auraient été recrutés clandestinement, entre octobre et début décembre 2016, dans des camps militaires et de réfugiés en Ouganda et au Rwanda, où ils rongeaient leur frein depuis la défaite du groupe armé en novembre 2013. Ils auraient été dotés d’uniformes et d’armes, intégrés dans la police, l’armée et des unités de la Garde républicaine, puis déployés à Kinshasa, Goma et Lubumbashi pour y utiliser, selon d’anciens combattants eux-mêmes, la force létale, y compris à « bout portant ».
Faut-il être surpris par l’information, quand on sait que d’autres anciens rebelles avaient intégré – officiellement eux – les forces de sécurité congolaises, suite à l’accord de paix signé le 23 mars 2009 ? Ce qui est sûr, c’est qu’on ne devrait pas être surpris par la réaction des autorités habituées à produire un discours complotiste sur les organisations internationales de défense des droits de l’Homme.
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