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Elections apaisées en RDC, c’est plutôt mal parti jusqu’ici

Les signes d’apaisement se multiplient en République démocratique du Congo, pays en crise politique aigüe depuis l’expiration du dernier mandat constitutionnel du président Kabila en 2016. Plus d’interdiction de marches pacifiques ou d’activités publiques de l’opposition, annonce-t-on au ministère de l’Intérieur. Mais dans le même temps, le pouvoir envisage de mettre fin au dédoublement des partis politiques de l’opposition. Curieux, non ?

« Nous sommes finis. Qu’est-ce qu’on va devenir ? » Ces mots pleins d’inquiétudes d’un des dissidents enrôlé dans un cabinet d’un haut fonctionnaire à Lubumbashi, sont scandaleux, voire criminels. On se rend compte à quel point le désordre comme mode de gestion publique arrange certaines personnes. « Allez, c’est fini le désordre. Calmons le jeu, et allons aux élections que le monde veut apaisées », peut-on lire dans le non-dit de ce discours.

Tout d’un coup, les pyromanes deviennent sapeurs-pompiers

C’est en tout cas, pour ma part, le sens de l’idée de la fin des dissidences des partis politiques de l’opposition et le retour à l’ordre d’avant les dédoublements. Curieusement, en plus, le porteur de ce bon sens brusque s’appelle Joseph Olengankoy, lui-même recruté pour avoir contribué au désordre au sein de la plateforme de l’opposition, le Rassemblement. Il a été porté à la tête du Conseil de suivi de l’accord de la Saint-Sylvestre, et son compagnon Bruno Tshibala Premier ministre également « dédoubleur » de l’UDPS.

De tout ce monde, et le régime de Kabila est à la manœuvre dans tout ça, on a du mal à croire que d’un coup ils veuillent apaiser le climat politique qu’ils ont volontairement crispé. Je souhaite, toutefois, rester positif et croire qu’ils sont capables de faire encore mieux. Mais au fond, cette démarche recèle deux implications bien plus graves.

1. Le pouvoir est fatigué d’entretenir le désordre

En 2016, à la naissance du Groupe de 7 partis frondeurs et proches de l’opposant Katumbi exclus du pouvoir, le gouvernement a soutenu les dissidents, en cautionnant le dédoublement de ces partis du G7. Parmi les dissidents, plusieurs sont devenus ministres ou hauts fonctionnaires publics.

Ils se sont en plus proclamés légalement reconnus, alors qu’on sait qu’aucune remise et reprise n’a eu lieu avec les directions des partis dont ils se sont séparés. Comment donc ont-ils pu avoir des documents légaux, s’ils n’ont pas été aidés par des faussaires ? Voir des hauts fonctionnaires plonger dans un tel usage de faux, est plus que criminel.

2. Un aveu de violation du droit

Il ne fait aucun doute que des violations graves des lois, de l’ordre public et de la moralité ont été commises. On sait à quel point les partis dédoublés et leurs dissidents se sont disputés leurs patrimoines, parfois dans la violence. C’est révoltant de constater comment les lois – à commencer par la Constitution – sont foulées au pied en RDC dans ce désordre volontairement entretenu. Le gouvernement se plaît à interdire toute manifestation publique, même pacifique, aux organisations citoyennes et aux partis politiques à voix dissonante. Et un matin, au nom de l’apaisement tel un coup de baguette magique, on annonce la levée de l’interdiction. Comme si la Constitution était subordonnée à la volonté des gouvernants. Déjà, « c’est mal parti » pour le processus électoral en RDC. Alors qu’on chemine vers les élections en fin d’année 2018, injures, intolérances et application sélective des lois se multiplient.

Mais je pense qu’il est encore possible de nous rattraper, malgré tout ce grand désordre. Le premier pas est le respect des lois et de la dignité humaine.

 


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